Trouver sa place suppose toujours une autorisation… et un deuil.

Quand on pense aux difficultés à trouver sa place, on pense facilement aux questions d’autorisation. Et à raison. Mais il y a une dimension qu’on occulte généralement au passage, c’est celle du deuil à faire en parallèle…

Trouver sa place au travail, sa vraie place, sa place à soi, suppose bien sûr de s’en donner le droit. Un droit qui souvent ne va pas de soi, car il n’a été concédé ni par la famille, ni par l’école, ni par les proches, ni par l’entreprise. Or, je ne peux pas être qui je suis, l’exprimer, le rayonner si en effet je ne m’en donne pas l’autorisation…

Pour autant, le fait d’être souvent resté à l’intérieur des limites et des voies (voix ?) définies par d’autres n’a pas eu que des conséquences limitantes. Elle nous a aussi obligé à compenser. Si, par exemple, je ne me donne pas le droit d’exprimer la créativité que je porte, mais que tous semblent dénier, je vais sûrement… la rêver ? M’imaginer artiste à défaut de peindre… Grand écrivain même si je n’écris pas… Me raconter que j’aurais pu avoir un vrai destin sur les planches si on m’avait laissé… Encouragé… Soutenu… Rien de plus naturel au demeurant, et rien en soi de contestable. Sauf que…

Sauf que le jour où justement je progresse et que j’accepte enfin de revendiquer ma créativité, et de la réaliser concrètement, je ne vais pouvoir l’incarner que de là où j’en suis réellement, avec le peu d’expérience que j’ai encore et les limites qui sont de toute façon les miennes. Pas de là où je me suis rêvé pendant toutes ces années. Dans la réalité, pas dans le fantasme.

Il va donc bien falloir pour y parvenir que je fasse aussi le deuil de cette image idéalisée de compensation. Et c’est souvent bien plus douloureux en fait que de s’accorder enfin l’autorisation nécessaire. Parce que se donner le droit a bien sûr une évidente dimension de libération et de progrès. Alors qu’accepter de n’être qu’un débutant encore maladroit, un écrivain peut-être moyen ou un acteur limité oblige l’ego à un vrai renoncement.

Ni interdit, ni prétention, ni fausse modestie ni grandiosité… encore et toujours une voie du milieu.

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