Trouver sa place suppose toujours une autorisation… et un deuil.

Quand on pense aux difficultés à trouver sa place, on pense facilement aux questions d’autorisation. Et à raison. Mais il y a une dimension qu’on occulte généralement au passage, c’est celle du deuil à faire en parallèle…

Trouver sa place au travail, sa vraie place, sa place à soi, suppose bien sûr de s’en donner le droit. Un droit qui souvent ne va pas de soi, car il n’a été concédé ni par la famille, ni par l’école, ni par les proches, ni par l’entreprise. Or, je ne peux pas être qui je suis, l’exprimer, le rayonner si en effet je ne m’en donne pas l’autorisation…

Pour autant, le fait d’être souvent resté à l’intérieur des limites et des voies (voix ?) définies par d’autres n’a pas eu que des conséquences limitantes. Elle nous a aussi obligé à compenser. Si, par exemple, je ne me donne pas le droit d’exprimer la créativité que je porte, mais que tous semblent dénier, je vais sûrement… la rêver ? M’imaginer artiste à défaut de peindre… Grand écrivain même si je n’écris pas… Me raconter que j’aurais pu avoir un vrai destin sur les planches si on m’avait laissé… Encouragé… Soutenu… Rien de plus naturel au demeurant, et rien en soi de contestable. Sauf que…

Sauf que le jour où justement je progresse et que j’accepte enfin de revendiquer ma créativité, et de la réaliser concrètement, je ne vais pouvoir l’incarner que de là où j’en suis réellement, avec le peu d’expérience que j’ai encore et les limites qui sont de toute façon les miennes. Pas de là où je me suis rêvé pendant toutes ces années. Dans la réalité, pas dans le fantasme.

Il va donc bien falloir pour y parvenir que je fasse aussi le deuil de cette image idéalisée de compensation. Et c’est souvent bien plus douloureux en fait que de s’accorder enfin l’autorisation nécessaire. Parce que se donner le droit a bien sûr une évidente dimension de libération et de progrès. Alors qu’accepter de n’être qu’un débutant encore maladroit, un écrivain peut-être moyen ou un acteur limité oblige l’ego à un vrai renoncement.

Ni interdit, ni prétention, ni fausse modestie ni grandiosité… encore et toujours une voie du milieu.

Infériorité, supériorité, rigidité… ou seulement fragilité ?

Complexe d’infériorité ou sentiment de supériorité, égo timide, maladroit, rigide, encombrant, chez soi comme chez l’autre… n’est-ce pas toujours seulement de fragilité dont il s’agit ?

  • Nous connaissons tous en effet des gens qui se la racontent beaucoup, décrivent à qui veut les entendre leurs exploits réels ou supposés, et cherchent ainsi à nous convaincre en permanence qu’ils sont très importants. Parfois c’est même de nous dont il s’agit d’ailleurs…

Nous connaissons tous de même des gens qui se dénigrent à chaque fois qu’ils en ont l’occasion, et cherchent à nous convaincre sans cesse qu’ils ont bien peu de valeur, qu’ils ne sont (au choix) « pas créatifs », « pas capables de… », « pas compétents bien sûr », « trop fragiles ou « trop limités ». Et parfois c’est de nous aussi dont il s’agit…

  • Mais au fond – et dans tous les cas – ne s’agit-il pas seulement d’un doute profond sur sa propre valeur ? Compensé ou inhibant, détourné, répété, manipulé, mais persistant et douloureux…

Je ne prétends être quelqu’un d’important en effet… que si au fond je n’en suis justement pas sûr. Sinon pourquoi vouloir vous en convaincre ? Avez-vous déjà vu quelqu’un de réellement confiant se glorifier de ce qu’il fait simplement bien ?

De même, je ne répète – à qui veut l’entendre – que je ne suis pas créatif / compétent / beau / intelligent / solide / généreux que si je le suis au fond, mais sans parvenir encore à l’assumer. Sinon pourquoi même en parler ? Avez-vous déjà vu quelqu’un éprouver le besoin de nier… ce qui ne le concerne pas ?

  • Face à quelqu’un qui prétend, ne convient-il donc pas seulement de le rassurer ?

Face à quelqu’un qui dément, ne faudrait-il pas surtout le questionner ?

Car, au final, ne s’agit-il pas toujours d’accepter ?

Ce que je porte.
Ce que je suis.
Ce qu’il est.
Ce que nous sommes.

Là où il y a une vérité… il y a une voie !

On aime souvent affirmer avec conviction : « Si on veut, on peut ! ». « If there’s a will, there’s a way » disent même les anglais. Sauf que… est-ce qu’on réfléchit alors assez à la question – pourtant cruciale – de la pertinence du vouloir concerné ?

Si je veux en effet ce que je ne peux pas obtenir, ou ce qui ne fait pas sens autour de moi, pourquoi donc y parviendrai-je, même à force de talent, de vigueur, d’activisme et de méthode Coué ?

Si Usain Bolt, par exemple, avait décidé mordicus de devenir champion du monde de lancer du poids, pour faire plaisir à son père, par défi, par entêtement ou par provocation, croyez-vous vraiment que ç’aurait été possible ? Et si je décide demain de devenir Président de la République, que croyez-vous qu’il se passera ? Alors bien sûr on pourra toujours se dire que nous ne l’avons pas voulu assez, et s’accuser de faiblesse, d’inconstance ou de lâcheté. Mais pourquoi faire ? Quand 30 tennismen, par exemple, hommes ou femmes, déclarent en interviews le 1er janvier vouloir être numéro un mondial, et qu’un / une seulement le devient au final… que faut-il donc penser des 28 autres ? L’ont-ils vraiment moins voulu ? Ou n’était-ce seulement pas la question ? Pas la vraie question ?

Ce que je crois en effet, c’est que la seule chose que je peux vraiment vouloir, au sens plein du terme… c’est ce que je porte en profondeur. Que rien ne sert ainsi de vouloir ce que je ne suis pas, ce que je ne porte pas.

Et si je le porte bien en profondeur, et que je le veux effectivement – au sens où je le reconnais et que j’accepte de m’y conformer – alors oui, l’univers devrait bien conspirer à ce que ça puisse avoir lieu. Pas parce que ma petite personne en a décidé ainsi et qu’elle a les moyens de soumettre le monde à sa volonté de puissance, mais parce que l’intention conjuguée avec l’adéquation doivent permettre la réalisation.

Car en réalité, au final et pour chacun de nous, il y a une voie là où il y a une vérité.

Et là seulement.

Ne croyez-vous pas ?

Intelligence Artificielle… mais de quelle intelligence parle-t-on ?

S’il est bien un sujet dans l’air du temps, c’est celui du développement de l’intelligence artificielle. Mais si on interroge aujourd’hui à l’infini, avec beaucoup de passion parfois, ses applications, leur utilité et leurs conséquences potentielles, questionne-t-on assez l’idée même d’intelligence associée ? Et la représentation sous-jacente qu’elle suppose ? (A noter : cette article a fait l’objet d’une parution dans la revue Personnel, la revue de l’ANDRH – Numéro 585 – Novembre / Décembre 2017)

Soyons ainsi direct et un peu provocateur : si une intelligence peut se reproduire de façon artificielle, se prévoir, se « mécaniser » … est-ce encore d’intelligence dont il s’agit ? Ou seulement d’une simple capacité de calcul, d’observation et de reproduction ? Une partie du débat réel ne tient-il pas ainsi à l’ambiguïté du mot lui-même ? Ce mot tellement fort et tellement flou…

Le monde occidental, issu des Lumières et du positivisme scientifique, a ainsi, à force de primauté accordée au mesurable et au quantifiable, un peu sans le vouloir, un peu par pouvoir, réduit l’intelligence à ce qu’il en maîtrisait le mieux : la capacité d’analyse. Ce faisant – rien n’est jamais neutre ni gratuit – il a dévalorisé au passage toute autre forme d’intelligence possible. Nombre d’élèves en ont ainsi fait les frais très tôt, convaincus par le système dès leur plus jeune âge qu’ils étaient de peu de valeur, alors qu’ils étaient simplement intelligents… autrement : de façon plus libre, plus créative ou plus instinctive, plus physique, plus émotionnelle ou plus relationnelle, en dehors des formats usuels, des contraintes de l’institution, des présupposés académiques… et des possibilités d’artificialisation associées ? Je rencontre ainsi tous les jours – en accompagnement individuel – des femmes et des hommes que leur forme d’intelligence a tenus à l’écart des valeurs les plus officielles. Au détriment de tous.

L’intelligence artificielle – contrairement à ce que le mot incite par nature toujours à penser – ne condense donc pas l’intégralité de la question essentielle. Prenons ainsi l’exemple du recrutement, puisque c’est également mon métier. Oui, le développement d’algorithmes va permettre de trier plus vite des candidatures en nombre, de sourcer plus rapidement des candidats compétents – au moins en apparence – sur des bases toujours plus précises et plus quantifiables. C’est vrai. Et on peut imaginer ainsi demain que le travail amont du recruteur aura quasiment disparu, au profit de bases de données énormes et d’algorithmes puissants. Mais aura-t-on progressé pour autant en intelligence du recrutement ? Car ce qui fait un bon recrutement n’est pas la rapidité du sourcing, mais la qualité unique et vivante de l’adéquation… dont ici bien sûr il ne saurait être question. Se développent ainsi aujourd’hui des applications qui prétendent révolutionner le recrutement en faisant du sourcing et de la candidature des actes toujours plus simples, plus rapides et plus limités, presque anodins, juste un like, un clic en passant sur son mobile. Est-ce qu’on mesure bien l’absurdité fondamentale de ce qui se joue là au fond ? Comme si la juste adéquation durable d’un être et d’un métier, ou même seulement d’un individu et d’un job à un instant donné, pouvaient tenir à une rencontre fortuite ? Comme un « coup » d’un soir, sans intérêt ni conséquence, né de l’affinité de surface de quelques mots clés partagés. Alors oui bien sûr on peut ainsi simplifier et accélérer… si tant est que vitesse et recrutement au final fassent si bon ménage. La plupart des recrutements ratés auxquels j’ai assisté étaient dus en effet, soit à un excès de précipitation partagé, soit à un défaut d’intégration réelle. Pas à un mauvais sourcing. Ou comment « artificialiser » l’accessoire en faisant croire qu’on a traité l’essentielqui lui justement ne peut pas être mécanisé !

A trop parler ainsi « d’intelligence » quand on évoque seulement la possibilité d’analyser, de trier, de mécaniser et de reproduire sans intervention humaine – certes avec toujours plus de talent des opérations toujours moins simples – on continue d’entretenir l’ambigüité autour d’une vision de l’intelligence réduite et univoque. Et on crée en cascade, sans même s’en rendre compte, toute une série de conséquences problématiques. A commencer par la diffusion de l’idée – un peu terrifiante, il faut bien l’avouer – que l’on pourrait tous être remplacés par des robots, quels que soient son savoir-faire et son expérience. Si la seule valeur est l’intelligence, et si la seule intelligence est celle que les robots peuvent s’approprier, alors oui nous sommes tous – ou presque – en danger. Pourtant, la seule chose qui peut être robotisée en réalité est notre aptitude à nous comporter comme tel. Mais pas notre capacité à innover, à anticiper ce qui n’existe pas encore, à créer des relations neuves ou à proposer des solutions de collaboration partagées…

Cessons donc de réduire ainsi l’intelligence, et ne faisons pas de l’intelligence artificielle autre chose que ce qu’elle est, un facteur considérable de simplification productive, avec les possibilités et les risques qui vont avec. Et ce d’autant que son développement n’a de sens que si nous imaginons effectivement un monde plus riche d’avoir transformé des tâches limitées, répétitives ou dangereuses. Si l’intelligence artificielle doit seulement priver du travail qui les porte et les nourrit des contingents d’individus de par le monde au service de la seule maximisation des profits de quelques-uns, elle portera au final bien peu d’intelligence… collective. Mais si elle doit nous être utile en profondeur, elle ne peut l’être qu’en libérant du temps et de l’énergie pour plus important que ce qui aura été substitué. Ce qui suppose bien de reconnaître les autres formes de vie, d’expression, de relation, de création, d’intelligence ou d’oisiveté… comme justement plus essentielles que celles qui auront été mécanisées ! Car au fond l’intelligence artificielle ne s’applique… qu’à ce qui n’est pas intelligent, au sens déjà vu, déjà connu, facile à analyser, à maîtriser et à reproduire. Voitures autonomes, robots ménagers sophistiqués ou algorithmes de ciblage efficaces, c’est toujours d’artifices de substitution dont il s’agit. Des développements récents de l’intelligence artificielle montrent ainsi comment on parvient déjà à faire produire un faux portait de Rembrandt[1] par un ordinateur. Le résultat est bluffant, il est vrai. Mais ce n’est qu’une re-production, à partir de modèles et de data, un travail de faussaire en quelque sorte. La vraie production, la vraie création demandent – elles – toujours une intelligence qui ne saurait être grégaire, routinière ou passéiste.

Le vrai, le neuf, le juste, le vivant ne se laissent pas réduire si facilement. Et c’est bien eux pourtant qui doivent nous gouverner. Sinon comment vivre en harmonie avec un monde… qui lui ne cessera pas de changer ?

 

[1] Un groupe d’historiens de l’art, d’analystes de données et d’informaticiens a réussi aux Pays-Bas, en 2016, à créer un tableau de Rembrandt grâce à l’intelligence artificielle et aux imprimantes 3D. En analysant de façon approfondie plus de 300 tableaux de l’artiste flamand, ils ont réussi ainsi à concevoir un nouveau portrait qui aurait pu être imaginé par le Maître hollandais. Après 500 heures de calculs, l’ordinateur a ainsi donné naissance à un tableau « inédit »…

 

« Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux. » (Eugène Ionesco, « Rhinocéros »)

Entre un cercle vertueux de confiance et de réussite, et un cercle vicié de peur, d’évitement et d’échec, le résultat final peut être spectaculairement différent. Mais avons-nous toujours conscience que – au point d’origine – l’écart pouvait être souvent minime en réalité ?

Imaginez ainsi… quelque chose que vous n’aimez pas faire ! Et pour chacun d’entre nous, ce sera une situation différente : informatique ou prise de parole en public, développement commercial ou gestion des conflits… Par timidité, par habitude, parce que vous vous êtes laissé convaincre que ce n’était pas pour vous, ou parce qu’il y a là quelque chose qui ne vous parle pas, vous évitez donc la situation, c’est plus simple. Mais plus vous l’évitez, moins vous savez la gérer, c’est logique. Donc moins vous avez confiance en vous, donc moins vous pouvez la gérer, donc plus vous l’évitez. Plus l’évitement devient une contrainte. Plus vous êtes obligé de choisir des situations, donc des jobs, dans lesquels vous n’y serez pas confronté. A la fin bien sûr, vous pensez que vous en êtes incapable et que vous avez donc bien fait de ne pas l’affronter. Ce qui au départ était une réticence est devenu fatalité, i.e. une croyance intérieure suffisamment ancrée qui achève de conditionner vos choix. Mais est-ce vraiment juste ? D’ailleurs… a-t-on jamais peur de ce qui ne nous concerne pas ?

Imaginez encore… Au lieu d’éviter la situation, malgré vos doutes, vos craintes et vos réticences, vous l’affrontez, même si c’est sans confiance, même si c’est du bout des lèvres. Comme vous l’affrontez, vous apprenez, donc vous progressez. Progressant, vous prenez confiance. Affrontant, vous prenez la mesurez de la difficulté réelle, vous trouvez des alliés, vous imaginez des méthodes, vous sériez les problèmes. Au final, et même si vous n’y trouvez pas de plaisir ou d’intérêt particulier, vous avez intégré une compétence complémentaire. En tout cas, ce n’est plus une contrainte, encore moins un handicap.

Bien sûr, toutes les difficultés ne se laissent pas réduire ainsi… mais beaucoup si ! C’est là qu’une prise de recul est nécessaire, et parfois un accompagnement. Pour mesurer ce qu’il en est vraiment de nos incapacités supposées. Et ouvrir la porte à de vraies transformations, souvent plus simples qu’il y paraît…

Ma place… ou la leur ?

Pour illustrer un propos vraiment essentiel, un court texte de Juliette Allais, extrait de « Trouver sa place au travail »…

Pour qui travaille-t-on ? Comment, pourquoi et pour qui choisit-on tel ou tel métier ? Et d’ailleurs, qui choisit véritablement ? Nous imaginons que nous sommes les seuls à décider de tout cela, à partir de nos aspirations et de nos capacités. Or, la vie professionnelle est certainement l’un des lieux où les déterminismes familiaux sont les plus massivement opérants. Parce qu’il s’agit de notre trajectoire, nous oublions, en effet, qu’elle s’est toujours construite d’abord dans un climat particulier : celui de nos parents, dont nous avons capté – inconsciemment – les références, les valeurs, les difficultés, les interdits, les espoirs insatisfaits …

Double conséquence : à la fois, dans notre manière de nous représenter le travail (donc de l’aimer ou pas, de l’accepter ou pas), mais aussi, de nous placer dans la continuité de nos prédécesseurs, en termes de carrière, de motivations, de « missions » … En effet, face à leur histoire, quelle va être notre posture ? La répétition de scénarios d’échec ou de souffrance, par loyauté ou pour ne pas les trahir ? La réparation, avec pour nous l’obligation de réussir à tout prix là où ça n’a pas marché pour eux ? La continuation de leurs propres créations et activités, pour leur faire plaisir, être important à leurs yeux, gagner leur amour, créer une dette à notre égard ?

Beaucoup d’entre nous sont ainsi « programmés » pour choisir un métier en fonction des attentes ou fantasmes de leurs ascendants. Or, que se passe-t-il lorsque cette voie ne leur convient pas, ou pas tout à fait ? Peut-être feront-ils illusion un certain temps … mais à un niveau plus profond, ils seront constamment soumis à une pression considérable. Ceux qui se laissent ainsi désigner une place de façon arbitraire se voient dépossédés de leur propre désir, en se conformant à des choix qui ne sont pas les leurs. Même si leur intention est de faire plaisir à certains membres de la famille, ce qui leur permet dès lors de ne pas déplaire, ils se sacrifient sur l’autel de la bonne conscience et du « familialement correct», en étant purement et simplement mis en place d’objet.

Imaginer que d’autres pourraient prendre la direction de notre propre vie – impunément – est une illusion qui ne peut que déboucher sur des situations stériles.

Nous ne pouvons sacrifier à personne la trajectoire qui nous est propre.

 

1 Comment

Et si notre corps avait toujours raison ?

Oui, je le sais bien, c’est un blog consacré à la place au travail, pas aux médecines douces. Et pourtant, en matière de place professionnelle aussi, les ressentis, les expressions du corps et les accidents de la vie peuvent être un guide utile, un allié fidèle quand il s’agit de comprendre réellement qui nous sommes et de quoi nous avons besoin…

Si je ne peux plus me lever pour aller travailler, si je tombe soudainement malade, si je suis victime d’un accident, si je me casse un bras, un coude, un pied… dois-je nécessairement en accuser la malchance ou la fatalité, même si c’est naturel ? Ou bien réfléchir à ce dont il pourrait être question sinon ?

Aussi étrange que ça puisse paraître en effet, il semblerait bien souvent que ça ne se soit justement pas produit par hasard. Mais par nécessité. Et pas pour nous retarder, nous punir ou nous contrarier. Mais pour notre meilleur bien.

Comme si la partie de nous la plus profonde, celle qui sait ce que nous portons de plus précieux, ce que nous avons besoin de vivre et d’incarner, n’avait parfois pas d’autre moyen de s’exprimer que de résister ainsi à ce que nous lui faisons subir sinon à force d’habitudes, de déni, de discours réalistes et de souci de bien faire. Si le capitaine du navire reste ainsi sourd à ses appels répétés, alors le chef des machines peut fort bien trouver un moyen de mettre les machines en panne. Pour que nous prenions le temps de nous arrêter, de nous reposer, de réfléchir, de prendre du recul, d’infléchir notre course. Et le plus souvent sans que ça ait d’ailleurs aucune conséquence négative, au-delà de la gêne directement occasionnée.

On le sait bien, il est très facile de mentir en paroles, alors que les attitudes et les gestes généralement ne mentent pas. Mais si le corps ne ment pas aux autres, pourquoi nous mentirait-il à nous ? Sachons donc l’écouter. Il pourrait bien savoir lui ce que justement nous ne voulons pas voir.

Comme le dit d’ailleurs un vieux proverbe très connu, qui veut aller loin… manage sa monture !

1 Comment

Trouver sa voie. Trouver sa voix… Et si on acceptait de parler de soi ?

Dans beaucoup de situations professionnelles aujourd’hui, il est utile, voire indispensable, de savoir se mettre en valeur. Pourtant, pour beaucoup d’entre nous, ça ne va pas de soi…

Pour convaincre un patron ou un recruteur quand on est salarié, fédérer une équipe quand on est manager, développer son réseau, gagner des clients quand on est à son compte, une certaine qualité de présentation et de rayonnement personnel est bien sûr indispensable. Mais pour autant elle nous est souvent difficile. Même quand on a toutes les qualités requises, les compétences ou les talents nécessaires, même quand on est reconnu et apprécié par ses pairs. Par pudeur pour les uns, par timidité pour d’autres, parce que « ça ne se fait pas », par peur de décevoir, de déplaire ou de déranger, parce que n’avons pas été autorisés à nous « exposer », trop d’entre nous hésitent à encore à « se montrer », ne veulent pas « se vendre », ne savent pas « se raconter ».

Or, il est devenu impossible de trouver une place sans la chercher, et de la chercher sans se mettre en valeur. A ce titre, le monde a beaucoup changé. A vrai dire, il est même passé d’un extrême à l’autre. Là où la bonne éducation supposait beaucoup de discrétion, de réserve, de retenue, la juste efficacité moderne suppose surtout sa propre mise en scène. Il suffit de considérer des modèles de succès publics que peuvent être aujourd’hui… Kim Kardashian ou Donald Trump ! Quand il s’agit d’être remarqué, le silence est rarement d’or, et la pudeur surtout un handicap.

Trouver sa place aujourd’hui suppose ainsi d’être son propre ambassadeur. Donc sa propre voix. Au plus près du meilleur de ce que nous portons chacun. Pas par vanité, ni par hystérie, mais pour exprimer ce que nous avons à dire d’utile et de singulier. Si vous ne croyez pas à ce que vous faites en effet… faites autre chose ! Mais si vous y croyez, là où vous y croyez… pour quoi ne pas en parler ? Si ça vous intéresse, quand ça vous intéresse, pourquoi d’autres ne seraient pas intéressés aussi ? Si vous obtenez des résultats concrets et positifs, pourquoi ça n’aurait donc aucune valeur ? Et si vous ne parlez pas de vous, qui va le faire sinon ? Qui va le faire bien ? Qui va dire ce que vous avez à dire, ce que vous avez besoin de dire vous ?

Sale temps pour les perfectionnistes !

En entreprise ou à leur compte, beaucoup des meilleurs aiment le travail bien fait, très bien fait. Quoi de plus normal ?

C’est ce sens du détail, ce soin de tous les instants, ce souci constant de très bien faire qui les rend efficaces en effet, mais aussi appréciés, recherchés, valorisés. Pourquoi donc y renoncer ?

Problème : dans un monde sous pression constante, de plus en plus rapide, ultra-connecté, en modes projets permanents, comment faire tout bien tout le temps ? Est-ce même encore possible ? Comment réconcilier alors cette envie de perfection, ce goût des jobs impeccables, cette souffrance de l’approximatif… avec la nécessaire adaptation à un monde tendu, exigeant, inquiet, plus que jamais multidimensionnel, international, partagé, digital ? Sans y laisser sa santé, son courage, son envie ? A fortiori quand on a aussi une vie en dehors, et que dans celle là aussi on aimerait que tout soit parfait, ne pas faillir, ne pas décevoir. Avec ses enfants, ses amis, ses conjoints, ses parents, dans sa vie culturelle, sportive, associative…

Les plus politiques ne s’en soucient pas, ils ne s’intéressent vraiment qu’à ce qui les sert. Les plus dilettantes non plus, ils font ce qu’ils peuvent, et le ciel les aidera. Seuls les plus concernés sont en souffrance. Et pourtant cette souffrance ne sert à personne…

Amis perfectionnistes, le monde ainsi nous tend une perche, même si nous ne le savons pas. Il nous oblige à lâcher. A gagner en souplesse. Et à faire des choix. A perdre en contrôle, et à mieux définir nos priorités.

Nous ne serons pas parfaits et nous ne pourrons pas tout faire en effet. C’est devenu clairement impossible. Mais nous pouvons encore très faire bien l’essentiel… Et ce sera sûrement suffisant !

Alors, en 2017… A quoi allez-vous donc renoncer ?

Trouver ma place, c’est ma responsabilité !

Le monde a changé. Longtemps l’organisation a porté l’employabilité de ses salariés, elle s’en est chargée pour eux. Mais c’est de moins en moins vrai. Et c’est une chance !

Dans l’ancien modèle, c’était l’organisation qui– pour l’essentiel et le plus souvent – décidait de ce que le salarié allait faire, où et quand, de comment il allait évoluer, assurait sa formation et garantissait sur la durée la sécurité de son emploi et de ses revenus. C’était simple et rassurant. Fermé aussi.

Dans le modèle qui se dessine peu à peu, c’est le salarié au contraire qui porte la responsabilité de sa propre employabilité durable, au fil de contrats successifs ou parallèles, d’avancées, de changements, de formations, de prises de risques. C’est moins confortable mais plus ouvert, ça demande plus d’efforts et de mobilité, mais ça laisse aussi plus de place à ses propres envies.

Qu’on le veuille ou non cependant, l’évolution semble claire. Les entreprises n’ont plus les moyens de garantir des jobs sur une durée longue, les contextes sont plus mouvants et plus incertains, elles ont besoin de plus de flexibilité. Dans le même temps, les salariés, jeunes notamment, ont aussi moins envie qu’on décide à leur place, et souvent plus d’appétence pour le changement. Résultat ? Les contrats changent. On y offre moins de sécurité, on y demande moins de loyauté, on y garantit moins de pérennité partagée.

Conséquence ? Il nous appartient chacun de nous prendre en main, de ne pas attendre de l’organisation ce qu’elle ne peut plus donner, de reconnaître et d’incarner le meilleur de ce que nous portons, de prendre la responsabilité de nous former régulièrement. Au gré de nos envies, et de ce qui fait sens pour nous.

La liberté est l’avenir du salarié !