Infériorité, supériorité, rigidité… ou seulement fragilité ?

Complexe d’infériorité ou sentiment de supériorité, égo timide, maladroit, rigide, encombrant, chez soi comme chez l’autre… n’est-ce pas toujours seulement de fragilité dont il s’agit ?

  • Nous connaissons tous en effet des gens qui se la racontent beaucoup, décrivent à qui veut les entendre leurs exploits réels ou supposés, et cherchent ainsi à nous convaincre en permanence qu’ils sont très importants. Parfois c’est même de nous dont il s’agit d’ailleurs…

Nous connaissons tous de même des gens qui se dénigrent à chaque fois qu’ils en ont l’occasion, et cherchent à nous convaincre sans cesse qu’ils ont bien peu de valeur, qu’ils ne sont (au choix) « pas créatifs », « pas capables de… », « pas compétents bien sûr », « trop fragiles ou « trop limités ». Et parfois c’est de nous aussi dont il s’agit…

  • Mais au fond – et dans tous les cas – ne s’agit-il pas seulement d’un doute profond sur sa propre valeur ? Compensé ou inhibant, détourné, répété, manipulé, mais persistant et douloureux…

Je ne prétends être quelqu’un d’important en effet… que si au fond je n’en suis justement pas sûr. Sinon pourquoi vouloir vous en convaincre ? Avez-vous déjà vu quelqu’un de réellement confiant se glorifier de ce qu’il fait simplement bien ?

De même, je ne répète – à qui veut l’entendre – que je ne suis pas créatif / compétent / beau / intelligent / solide / généreux que si je le suis au fond, mais sans parvenir encore à l’assumer. Sinon pourquoi même en parler ? Avez-vous déjà vu quelqu’un éprouver le besoin de nier… ce qui ne le concerne pas ?

  • Face à quelqu’un qui prétend, ne convient-il donc pas seulement de le rassurer ?

Face à quelqu’un qui dément, ne faudrait-il pas surtout le questionner ?

Car, au final, ne s’agit-il pas toujours d’accepter ?

Ce que je porte.
Ce que je suis.
Ce qu’il est.
Ce que nous sommes.

Sale temps pour les perfectionnistes !

En entreprise ou à leur compte, beaucoup des meilleurs aiment le travail bien fait, très bien fait. Quoi de plus normal ?

C’est ce sens du détail, ce soin de tous les instants, ce souci constant de très bien faire qui les rend efficaces en effet, mais aussi appréciés, recherchés, valorisés. Pourquoi donc y renoncer ?

Problème : dans un monde sous pression constante, de plus en plus rapide, ultra-connecté, en modes projets permanents, comment faire tout bien tout le temps ? Est-ce même encore possible ? Comment réconcilier alors cette envie de perfection, ce goût des jobs impeccables, cette souffrance de l’approximatif… avec la nécessaire adaptation à un monde tendu, exigeant, inquiet, plus que jamais multidimensionnel, international, partagé, digital ? Sans y laisser sa santé, son courage, son envie ? A fortiori quand on a aussi une vie en dehors, et que dans celle là aussi on aimerait que tout soit parfait, ne pas faillir, ne pas décevoir. Avec ses enfants, ses amis, ses conjoints, ses parents, dans sa vie culturelle, sportive, associative…

Les plus politiques ne s’en soucient pas, ils ne s’intéressent vraiment qu’à ce qui les sert. Les plus dilettantes non plus, ils font ce qu’ils peuvent, et le ciel les aidera. Seuls les plus concernés sont en souffrance. Et pourtant cette souffrance ne sert à personne…

Amis perfectionnistes, le monde ainsi nous tend une perche, même si nous ne le savons pas. Il nous oblige à lâcher. A gagner en souplesse. Et à faire des choix. A perdre en contrôle, et à mieux définir nos priorités.

Nous ne serons pas parfaits et nous ne pourrons pas tout faire en effet. C’est devenu clairement impossible. Mais nous pouvons encore très faire bien l’essentiel… Et ce sera sûrement suffisant !

Alors, en 2017… A quoi allez-vous donc renoncer ?

Trouver sa place est l’affaire de tous

Parce que tout est lié… Un extrait de la conclusion de « Trouver sa place au travail » (Juliette Allais / Didier Goutman – Eyrolles 2012 / Livre de poche 2015)

« Trouver sa place au travail au fond n’est pas une question individuelle. Bien sûr la formule est délibérément paradoxale, mais elle a pour vocation ici, à la fin de cet ouvrage, de rappeler l’importance des enjeux collectifs toujours associés à l’idée même de travail.

Nous connaissons tous en effet trop bien des amis, des collègues, des patrons, des artisans, des commerçants, des enseignants… qui ne sont pas à leur place, ne font pas bien des métiers qu’ils méprisent, et génèrent ainsi –souvent sans même s’en rendre compte- des cascades de conséquences négatives pour eux-mêmes et pour les autres.  Des boulangers qui n’aiment pas le pain qu’ils font et nous le rendent amer, rejetés par leurs clients, désagréables en retour, malmenés par leur femme à cause de leur humeur, d’autant plus enclins à désespérer d’eux-mêmes et de leur métier. Des serveurs qui n’aiment pas servir, et nous le font bien sentir, transformant des instants de répit en moments de tension. Des assistantes qui voudraient être chefs, rechignent à la tâche toute la journée et compliquent la vie d’équipes entières. Des managers qui n’aiment personne, évitent tout contact, sont méprisés par leurs collaborateurs et s’enferment à leur tour dans un rejet hautain et stérile. Des entraîneurs d’équipe de football qui se murent de même dans le silence et dépriment au final des nations entières. De même que nous connaissons tous aussi des boulangers, des serveurs, des assistantes, des managers ou des entraîneurs, qui parce qu’ils aiment ce qu’ils font, créent à l’inverse des cercles vertueux de service et de confiance, de plaisir et de rayonnement. Chacun est donc responsable de sa place et de la façon dont il l’occupe, devant lui mais aussi devant tous les autres. Parce que tout est lié. Parce que nous sommes tous économiquement, socialement, professionnellement interdépendants. Trouver sa place n’est donc jamais seulement une question individuelle. Parce que je ne peux pas la trouver seul, puisqu’il faut bien qu’un autre me la confie, avec et pour lui. Parce que bien ou mal travailler, aimer ou pas ce que je fais, n’engage jamais que moi. L’enjeu dépasse toujours largement ma propre cause, pour toucher au fonctionnement collectif dans son ensemble. Si le battement d’une aile de papillon peut déclencher un cataclysme au final, que dire en effet d’une carrière ratée, d’une vocation manquée, d’une frustration permanente ?

Trouver sa place au travail questionne enfin la place qu’occupe justement le travail lui-même dans le monde qui est le nôtre. Car moins le travail est valorisé, plus il est difficile d’y penser positivement son intégration. Nous vivons pourtant collectivement, depuis des décennies, ce fantasme –car c’en est un- de travailler toujours moins pour dépenser toujours plus. Toujours moins d’heures de travail, toujours moins de journées, toujours moins d’années de travail, toujours plus de jours de repos, de loisirs et de consommation. Comme si le travail était nécessairement une purge, une corvée, un esclavage, une « torture » qu’il fallait réduire, encore et encore. Et le loisir une chance, un droit, une bénédiction, qu’il fallait défendre, renforcer, étendre, augmenter. Mais est-ce si évident aujourd’hui ? En quoi regarder des DVD sur un écran plat est-il au fond tellement plus formateur que de chercher à satisfaire un client dans une relation réelle et vivante ? En quoi bronzer sur une plage est-il plus intéressant, plus « nourrissant », plus attirant que d’animer des réunions de travail ? Et surtout, est-ce même encore possible ? Car nous ne sommes parvenus à entretenir durablement cette illusion qu’au prix d’un endettement collectif forcené, dont il faudra bien s’acquitter un jour, d’une façon ou d’une autre. Et si demain, faute de pouvoir même faire autrement, nous devons cette fois travailler plus, plus longtemps, sans autre perspective que de gagner moins, la question de l’ajustement à ce que nous ferons sera d’autant plus cruciale. Puisque nous ne pourrons travailler plus pour nous enrichir au plan quantitatif, ni non plus avec l’espoir de nous débarrasser à terme du travail lui-même, il ne nous restera donc plus qu’à investir –enfin ? – le travail d’une véritable valeur de réalisation individuelle et de service collectif.

Tant qu’à devoir travailler, et peut-être beaucoup – car nous n’y échapperons pas- autant faire ainsi ce qui est juste, pour nous-même, pour les autres et pour le monde. Peut-être est-ce ainsi d’ailleurs que la société évoluera vraiment, qu’elle apprendra à rendre enfin le travail intéressant pour tous, plutôt que de chercher seulement à l’éradiquer faute de savoir faire mieux. Si chacun de nos métiers avait vraiment un sens dont nous soyons tous conscients, ne serait-ce pas un plus grand progrès que si nous avions tous atteint la possibilité d’un farniente permanent, stérile et désœuvré ?

La révolution de 1789 voulait abolir les privilèges des aristocrates, pour ne permettre à personne de vivre aux crochets de tous les autres. Nous avons pourtant cherché depuis subtilement à faire l‘inverse, c’est-à-dire à étendre à tous les privilèges de quelques-uns. Sauf que c’est impossible. Après tout, n’en déplaise à la Genèse, on travaille peut-être même au Paradis… »

 

Mobilité interne en entreprise : Et si trop de formatage contrariait la gestion des talents ?

Professionnaliser le recrutement, c’est bien. Mais la juste adéquation d’un job et d’un individu ne saurait être pourtant qu’une question de processus et de compétences clés…

A titre de réflexion, un article publié en décembre 2015 dans le numéro 565 de la revue Personnel, la revue de l’ANDRH.

 

Accepter d’abord. Tout accepter.

Pour accompagner le changement… encore faut-il en accepter le point de départ !

Non pas ce qui devrait être, mais ce qui est.

Swâmi Prajnânpad

Vouloir faire mieux, aider l’autre à progresser, c’est bien. Mais est-ce possible si l’on ne commence pas par en accepter d’abord le point de départ ? Insatisfaisant certes, mais tellement réel aussi…

C’est vrai de nos propres changements. Si je n’accepte pas qui je suis, là où j’en suis aujourd’hui, je ne peux pas évoluer… puisque c’est de là que je dois partir. Je ne peux pas guérir si je n’accepte pas que je suis malade, car alors je n’irai voir aucun médecin, je ne suivrai aucun traitement. Comme je ne peux me rendre à l’autre bout du monde si je n’accepte pas d’abord d’être encore ici. Qu’il va falloir commencer par réserver des places d’avion, faire la queue à l’aéroport, refaire son passeport et changer de l’argent. Qu’on ne sera pas d’emblée sur la plage, à bronzer sous les cocotiers.

C’est vrai de même – quand on est consultant coach ou thérapeute – de tous ceux que nous accompagnons au quotidien. Si nous ne les acceptons pas nous-mêmes en profondeur à l’endroit de leurs difficultés, de leurs failles, de leurs peurs, de leurs résistances… comment pouvons-nous les écouter, les conseiller, les inspirer, les emmener, les aider ?

Or, c’est le plus difficile en réalité. Poser des questions, inventer des exercices, appliquer ou développer des méthodes, être attentif, patient, bienveillant, ça s’apprend, ça s’exerce, ça se travaille. Mais accepter l’autre, simplement, sans projections et sans jugement, accepter parfois de lui ce que justement il n’accepte pas lui-même, c’est une autre histoire. Parce qu’elle est bien plus masquée, bien moins lisible. Et puis aussi parce qu’elle nous renvoie souvent à la nôtre, et à tout ce que nous avons – ou pas – déjà accepté de nous même.

Mais « accompagner » au final, pourtant… n’est-ce pas toujours aider l’autre justement à accueillir consciemment plus de lui-même ? Plus de ses peurs pour pouvoir les surmonter… Plus de ses croyances pour pouvoir les questionner… Plus de ses envies pour pouvoir se les autoriser… Et plus de ses désirs pour pouvoir (enfin) les réaliser !